ELLE, Jeanne de Ménibus, vendredi 7 juin 2013


« La bibliothèque idéale de… Jean-Claude Ellena »

« Après nous avoir ouvert son Journal d’un parfumeur, Jean-Claude Ellena, qui règne sur les essences de la maison Hermès, publie La Note verte, premier roman sous forme de polar, où s’affrontent deux conceptions de la parfumerie – et à plus forte raison du monde –, un nez à l’ancienne contre un ambitieux prêt à se soumettre au marché formaté. Une guerre du goût exquise. Ce grand lecteur nous confie le livre…
… qui lui a donné le goût de lire.
Jean le Bleu, de Jean Giono, où cet écrivain sensuel – comme un autre père pour moi – relate sa jeunesse manosquine.
… qui a la composition parfaite.
Belle du seigneur
, d’Albert Cohen. Du point de vue littéraire, un roman parfait. Mais le fait que cet hymne à l’amour finisse très mal démontre magistralement l’échec de toute quête de perfection.
… qui lui a mis les sens en émoi.
Journal d’un corps
, de Daniel Pennac, miroir de mes émois de jeune homme qui se découvre, d’homme qui aime et de vieillard qui souffre !
… qui lui colle à la peau.
Parfum de femme
, de Giovanni Arpino. Un soldat escorte un officier aveugle. Ce maître en cynisme l’initie à tous les excès, en particulier le sexe et l’alcool. Un livre très olfactif.
… qui l’a fait renifler.
Une jeunesse
, de Patrick Modiano. L’histoire de deux jeunes gens qui découvrent, ensemble, les difficultés de la vie. J’ai souffert avec eux, si maltraités dans leur innocence.
… qui l’a fait rire.
Le Nez
, de Nicolas Gogol, dans lequel le héros se réveille… sans nez ! Idéal pour conjurer l’angoisse du parfumeur.
… qu’il a le plus souvent offert.
Un roi sans divertissement
, de Giono, encore lui. Un polar qui dérive vers des contrées psychologiques. J’y vois une mise en garde contre l’ennui.
… qui l’inspire.
Le Guépard
, de G. T. di Lampedusa. Je lis et relis sans cesse ce beau récit stendhalien pour le personnage de Don Fabrizio, qui a joui de sa vie en restant conscient d’appartenir à une société condamnée. J’envie ce regard lucide, mais exempt de regret. »