ACTUALITTÉ, Valentine Costantini, vendredi 14 janvier 2022


Voyage au cœur de Bleu Nuit, guidé par la plume de Dima Abdallah

Un appel téléphonique, qui vient fracasser les bases d’une vie déjà bien instable : la mort de la seule femme que le narrateur ait jamais aimé. Incapable de se rendre à l’enterrement, il reste cloîtré chez lui, comme depuis de si nombreuses années, à l’abri entres les murs de son appartement. Puis, miracle : le lendemain, il sort enfin – et quitte tout. Le confort, la sécurité, le silence, tout… et se donne à la rue.

Le narrateur, jamais nommé, trouve un refuge inhabituel dans l’impersonnalité d’une vie marginale, dehors, avec, pour seul compagnon, un sac de couchage. Il marche, jour après jour, découvrant ce quartier autour du cimetière du Père-Lachaise, après avoir laissé tomber ses clefs dans une bouche d’égout. Ainsi, pas de retour en arrière possible – il faut avancer, voilà tout.

« Les jambes ont réclamé de traverser le boulevard, alors j’ai traversé. Cette frontière infranchissable, sorte de rivière de lave, ligne de démarcation intraitable entre moi et le monde, s’est évanouie sous mes pieds qui foulaient le bitume dans un rythme régulier. Je marchais comme marchent les gens. Je traversais comme traversent les autres. Je ne pensais à rien à part au bruit qu’avaient fait les clefs quand je les avais jetées dans la bouche d’égout. Ça et le son métallique de la porte de l’immeuble qui se refermait derrière moi. Je marchais. Mes jambes n’avaient pas oublié. »

Notre protagoniste se laisse happer par le gris des trottoirs, des bâtiments parisiens, de l’atmosphère, avec un seul espoir : celui d’échapper à ce bleu qui le hante. Une simple couleur, une mélodie, un souvenir, une personne, une odeur, un endroit – finalement, tout à la fois ; voilà ce qu’exprime ce bleu nuit, ce bleu océan, ce bleu glacial qui plutôt que de fasciner, suffoque. Un supplice quotidien pour cet esprit tortueux, torturé, que l’on découvre chapitre après chapitre. […]

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