CENTRE FRANCE – LA MONTAGNE, Daniel Martin, dimanche 5 octobre 2014


« Le péquenot de Freud »

« Qu’on ne rate pas cette merveille ! Premier roman traduit d’un Autrichien promis au plus bel avenir.

La phrase, légère et vive, contraste avec une situation qui ne l’est pas : en 1937, l’Autriche est toute disposée à se laisser envahir par les forces hitlériennes. C’est le moment que choisit un jeune gars de la campagne pour venir travailler à Vienne chez un vieil ami de sa mère, buraliste de son état. Privilège réservé aux mutilés de guerre.

Les deux s’accordent sans problème. Franz découvre la ville, le métier, la clientèle. Parmi elle, un homme âgé, très élégant, amateur de cigares, peu disert : Freud en personne, le docteur des fous ? Oui. Et juif. Je ne vois pas où est le problème ! Mais d’autres si, qui ravagent régulièrement la boutique ou la couvre d’injures. Ce qui ne les découragera pas, jusqu’à un certain point, un certain moment.

Pour l’instant, Franz le naïf ose aborder le père de la psychanalyse, le questionner. Est-ce vrai que vous pouvez remettre en place les têtes des gens qui ne tournent pas rond ?

Freud se damnde bien pourquoi il répond à ce bouseux impertinent et s’attache à lui. Serait-ce parce qu’il est plein d’un bel appétit de vie qui contratse avec cette époque mortifère ? Il lui apprend le terme de libido et lui conseille d’aller voir les filles.

La suite est faite d’amour, de chagrin, de reconquête, de drames. Franz tombe amoureux fou d’une femme qui se donne à lui et disparaît, lui échappe. Elle lui apprend le plaisir, le doute, l’attente, la vie dont elle sait tous les périls : tzigane et promise au pire, saura-t-elle le protéger ?

Robert Seethaler affronte toutes les situations, le bonheur comme le pire, de sa phrase alerte, sans désarmer. Ce qui donne à son roman des tonalités proches du To be or not to be, cette merveille de Lubitsch ! »