ELLE (Suisse), Julie Vasa, jeudi 29 septembre 2022


Une romancière est née.

Entrée fracassante de la journaliste valaisanne Sarah Jollien-Fardel sur la scène littéraire : elle signe chez Sabine Wespieser éditeur un premier roman auréolé du Prix du Roman Fnac et en lice pour plusieurs autres dont le prestigieux Prix Goncourt.
Peut-on se construire lorsque l’on a été brisé dès sa tendre enfance par des violences inouïes ? Peut-on surmonter de telles souffrances ?
Sa préférée est le récit d’une femme en colère qui tente, coûte que coûte, de refaire surface. Jeanne a grandi dans la terreur d’un père ultra-violent qui, pour un rien, s’en prenait à sa mère, à sa sœur et à elle-même. Coups en tous genres, cheveux arrachés, viols, humiliations, multiples privations… toute une panoplie de violences psychologiques et physiques dont un homme terrifiant usait quotidiennement. À la différence de sa mère et de sa sœur, Jeanne a très vite pris conscience du cycle infernal de la violences et de la lâcheté de tout son entourage, incapable de la protéger. Insouciance envolée, peur chevillée au corps, colère et orgueil en guise de moteur, elle s’est construite tant bien que mal s’éloignant de sa famille dès qu’elle a pu. Pour autant, l’émancipation ne va pas de soi. Sa préférée témoigne du très long et sinueux chemin parcouru par Jeanne, parsemé d’obstacles au gré des événements, des disparitions des siens. Un élément, personnage à part entière du livre, l’aide à se prendre en main :  le Léman. Même si le passé refait régulièrement surface, le lac est « le complice de sa mue ». L’eau et la terre, du Valais, à laquelle la narratrice revient inlassablement pour se ressourcer. Porté par une écriture puissante, ce roman dit justement la souffrance, l’empêchement d’être heureux, la difficulté à se construire, l’impossibilité de pardonner les autres et surtout soi-même. Sarah Jollien-Fardel sera présente au festival du LÀC, événement littéraire genevois, les 1er et 2 octobre.