LE RÉPUBLICAIN LORRAIN, Rémy Beurion, mercredi 6 mars 2013


« Aux différentes façons d’écouter la pluie, s’ajoute, celle de Michèle Lesbre. À la violence du déclencheur de cette histoire, se pose une douceur incommensurable sur le récit. Le vieil homme qui lui sourit avant de se jeter sous la rame du métro porte en lui le fragile équilibre d’une histoire d’amour. Car au lieu de prendre son train pour l’hôtel des Embruns, l’écrivaine cède à la torpeur de ce suicide. Se jette dans les bras d’une nuit où le sommeil est en panne. À pas feutrés des mots que l’on sent presque toujours chuchotés pour ne rien briser de plus, la lecture s’enroule dans le doute d’une vie à deux. Il n’y a pas de cri, pas de hurlement, pas de voix perchée. Il y a le prétexte à fuir son propre présent, à chercher quelque chose comme le renoncement redouté ou la marche en avant. Il est photographe, il l’attend dans un hôtel où elle ne viendra pas, du moins pas ce soir. Parce qu’un homme qu’elle ne connaît pas, qu’elle croit connaître pourtant, s’est envolé vers la mort. Et ce saut, par un tiers interposé, ressemble à ce saut intérieur maintes fois retenu mais qu’une plume éclatante explore sur une centaine de pages. C’est un petit livre (par son épaisseur) qui tient pourtant une large place. Le finir est un déchirement. Mais on peut, comme le suggère le titre, écouter désormais la pluie. »