LES ÉCHOS, Philippe Chevilley, jeudi 12 septembre 2013


« Pierre blanche »

« Dans une rentrée littéraire française sans grande surprise, un roman en dehors des clous comme Pietra viva de Léonor de Récondo fait du bien… Un vent de fraîcheur et de poésie qui traverse les siècles, élève l’esprit, en balayant les pierres et la chair, l’amour et la douleur, la mort et l’éternité.

Violoniste baroque, Léonor de Récondo a conçu son livre comme une page musicale libre. Son héros n’est pas un musicien mais un sculpteur : Michel-Ange. Un génie torturé par les sentiments qui l’étouffent et qu’il refoule : amour pour sa mère, morte quand il avait six ans ; pour un jeune moine fauché dans la fleur de l’âge ; pour un enfant qui ressemble à celui qu’il était au même âge…

L’action se déroule à Carrare où l’artiste déprimé est parti se ressourcer avec l’excellent prétexte de choisir les blocs de marbre destinés au tombeau du pape Jules II. Dans les carrières couleur lune, au contact des simples marbriers et de la nature grandiose, Michel-Ange va apprendre à assumer ses sentiments et ses désirs d’homme – comprendre que la beauté est autant pierre que chair et que, en sculptant, il donne la vie ; les êtres qu’il taille dans le marbre gagnent le droit à l’immortalité. L’artiste ou la main de Dieu…

Plutôt que de nous asséner un roman historique appliqué, Léonor de Récondo nous offre une fable élégante sur l’art qui sauve la vie et défie la mort. Sculpter les notes, les mots, le marbre, c’est du pareil au même… L’écrivaine fait fondre le marbre des montagnes et le cœur de pierre de Michel-Ange pour exalter la sensualité du beau. Pietra viva, telle une pierre blanche, devrait marquer cet automne… »