L’HUMANITÉ, Muriel Steinmetz, jeudi 20 juin 2013


« Un amour d’après la catastrophe »

« Yanick Lahens vit à Haïti. Son dernier roman s’ouvre sur une scène d’amour dévorant entre un homme et une femme encore inconnus du lecteur. Déjà, dans Failles (2010), la romancière prévoyait de composer une histoire d’amour, dont l’écriture a été stoppée net par le séisme de janvier 2010, dans une ville bien précise, Port-au-Prince, où comme ailleurs, une certaine idée de l’amour a été façonnée par les livres, les chansons et le cinéma. […] Comme si elle voulait retrouver le temps perdu, elle a décidé, dans Guillaume et Nathalie, que ses personnages brûlent les étapes de la passion. On est touché d’emblée à l’évocation de ce couple qui, soudain, respire plus vite, dans lequel les partenaires s’imprègnent l’un de l’autre et dont on pense qu’ils se disent : Aimons-nous vite, avant le désastre ! Une fois décrit l’acte d’amour, le récit fait retour sur la rencontre entre Nathalie, architecte de 30 ans issue de la classe moyenne noire, et Guillaume, sociologue dans la cinquantaine, représentant de cette même classe. […]
Nous sommes en décembre 2009. La radio diffuse des alertes sur l’imminence d’un séisme. Yanick Lahens nous révèle les arcanes sombres de la capitale de l’île, putasse et dépravée, Port-au-Prince te sourit, Port-au-Prince alccol et paille, Port-au-Prince prédation, qui a faim de chair fraîche, petit garçon, petite fille, Port-au-Prince qui a une kalachnikov dans une main, un 9 mm dans l’autre.
D’une grande liberté d’allure, l’écriture de Yanick Lahens rend ainsi compte d’une ville […]. L’énergie délirante de l’île épouse l’âme des personnages et imprègne tout du long ce roman chaleureux et vivant. »