LIBRAIRIE POINT VIRGULE, CLÉMENT PLUMIER, Namur, Belgique,Septembre 2019


« « J’étais une fille autrefois, c’est fini. Je pue. Couverte de croûtes de sang, mon pagne en lambeau. Mes entrailles, un bourbier.

Emmenée en trombe à travers cette forêt que j’ai vue, cette première nuit d’effroi, quand mes amies et moi avons été arrachées à l’école. »

Cet incipit de Girl annonce la puissance du nouveau roman d’Edna O’Brien. Basé sur l’enlèvement de lycéennes par Boko Haram au Nigeria en 2014, ce texte bref rend hommage et dénonce les atrocités infligées par ce groupuscule extrémiste dans un souffle intense et profond. Impossible de relâcher le rythme de la lecture, la tension est à son comble comme si la vie de cette jeune femme dépendait de notre assiduité à tourner les pages. Bien plus qu’un récit sur un fait d’actualité, Edna O’Brien touche une authenticité à travers une fiction poignante qui, comme pour le personnage principal, Maryam, retourne les tripes, les laissant à l’état de bourbier. Pourtant, une pudeur est constamment mise en place alors que les actes horrifiants et humiliants des bourreaux sont décrits avec fermeté.

L’auteure aborde l’indicible à partir de l’intériorité de cette jeune victime et ainsi permet au lecteur de se projeter et de capter un tant soit peu l’horreur vécue par des centaines de personnes. La quête de recouvrer une liberté volée sera le point de départ d’un espoir sans fin qui raccroche à la vie et le fil conducteur de ce roman. Devenue une femme du « bush », souillée et meurtrie, Maryam et son enfant Babby devront continuer à lutter pour cette liberté, même auprès des leurs. Une vie volée pour une vie donnée, mais deux vies détruites, entre parenthèses et sans identité.

Texte d’une nécessité indubitable, professeurs, parents, amis, famille, ce roman est à mettre entre toutes les mains pour rendre hommage et justice, pour lutter et défendre les valeurs justes qui sont bien trop souvent mises à mal. »