LE MAGAZINE LITTÉRAIRE, Joyce Carol Oates, octobre 2016


« Le mal descend en ville »

« À Cloonoila, tous succombent au charme du « Dr Vlad », un criminel de guerre en exil déguisé en guérisseur. De leur union diabolique, Fidelma ne se relèvera qu’au terme d’un long chemin sacrificiel.

Poignant et hardiment imaginé, le nouveau roman d’Edna O’Brien, Les Petites Chaises rouges – sa 23e fiction depuis Les Filles de la campagne (1960) –, marque à la fois un retour vers cette peinture de l’Irlande rurale considérée du point de vue féminin qui lui a valu tant de louanges et un tournant radical : le texte conte un morceau d’une autre histoire, où la dévastation d’un pays d’Europe centrale déchiré par la guerre entre en collision avec l’innocence primordiale, perdue dans la plupart des lieux du monde, caractéristique de l’Irlande provinciale. Ici, aux dons célébrés d’Edna O’Brien pour le lyrisme et la précision mimétique, se superposent les talents d’une fabuliste aux visions nouvelles et dérangeantes, plus proche de Kafka que de Joyce, tandis que son portrait du « poète-guerrier » psychopathe Vladimir Dragan rappelle, lui, le Nabokov le plus sombre et le moins joueur. […] »