ANGERS MAG, WWW.ANGERSMAG.INFO, Sébastien Rochard, jeudi 29 janvier 2015


« C’est ce carcan – physique et moral – que la romancière choisit de faire voler en éclats, détaillant avec justesse le drame qui se noue autour du notaire Anselme, de sa femme Victoire et de la bonne, Céleste, sous le regard des domestiques Pierre et Huguette. Le drame d’un viol répété, l’histoire d’un enfant à naître, à élever puis à aimer et l’amour soudain, passionnel, qui unit les contraires.

Un huis-clos – parce que la maison est un véritable personnage à la fois témoin et gardienne de secrets – implacable, où le passé familial nourrit le présent, jusque dans la transgression ? La transgression ne m’intéresse pas, coupe Léonor de Récondo. J’espère avoir écrit un roman d’amour, celui qui s’immisce dans toutes les brèches, à toutes les époques. Je me suis intéressée à l’instant où tout bascule. Quand l’esprit croit avoir contraint définitivement le corps, mais que ce dernier prend finalement le dessus. Les corsets sont brûlés au propre comme au figuré.

Les amours qui unissent les personnages de son roman, inavouables à la veille de la Première Guerre mondiale, le sont-ils d’ailleurs totalement aujourd’hui, plus d’un siècle plus tard ? Sans doute pas, ce qui fait du livre de Léonor de Récondo, à son corps défendant, un manifeste. Un manifeste pour l’amour, qui n’a pas de genre. Je l’assume pleinement et j’ai tâché de lui donner toute sa beauté. Les femmes hier comme aujourd’hui doivent  être maîtresses de leurs corps. Nous avons encore beaucoup de chemin à faire pour que ce soit accepté.

Reste que ce propos engagé est lové dans un écrin stylistique remarquable. Je cherche la fluidité de la phrase, le mot juste. Des termes qui sont aussi bien littéraires que musicaux, avance Léonor de Récondo. Oui, il y a de la musicalité dans ce texte, du rythme, aussi bien dans les phrases que dans les courts chapitres qui donnent à voir ce huis-clos.

Un roman intelligent et accessible sur l’intransigeance du sentiment amoureux et la vacuité des codes que l’on s’impose, dans un monde qui n’est finalement pas si différent du nôtre… »