BLOG LE MONDE À CHACUN SA LETTRE, jeudi 21 mars 2013


« Ce jour-là, un sourire »

« Écoute la pluie glisse lentement des mots et des images enfermés dans une parenthèse. Michèle Lesbre teinte le récit de quelques touches d’un rêve tragique et fondateur. Enclos, comme protégés par une syntaxe pourtant fuyante comme l’histoire qu’elle raconte, les mots défilent en simples marcheurs. Dans la fiction, le récit de ce qui a étéde ce qui aurait pu être, et de ce qui n’a irrémédiablement pas été, ce jour-là. Écoute la pluie est, en miroir creux, l’expression d’une autre : sauf la pluie. Ce qui a été empêché, ce qui est né depuis la canne brisée d’un vieillard qui lui avait souri avant d’en finir avec la vie.

Les lettres aujourd’hui envoyées ne sont rien de plus que la manifestation d’une pluie intérieure, ressentie pour soi, ayant pour ciel le sourire du vieillard. Car ce sourire a donné quelque chose qu’il faut garder, elle décide de le graver sur du papier, après coup. Je refusais de le garder en mémoire dans son seul envol au-dessus du vide, j’avais besoin de l’inscrire dans le temps, son temps, c’était sans doute le sens de son sourire. Il me le demandait. Entre les gouttes, entre crochets, c’est donc un dialogue qui est né.

Michèle Lesbre a extrait un sourire de la trop silencieuse photographie et a fait jaillir un texte d’une force étonnante. Ce chemin emprunté et ses embûches nécessaires, ce chemin salvateur, peut-être, qui dessine les souvenirs et les images inventées, aussi denses et indifférenciés que des gouttes qui cognent, une nuit d’orage. »