LIREAULIT.BLOGSPOT.COM, dimanche 7 février 2021


« Pas facile de parler d’un texte aussi fort, aussi fascinant…

Je vous préviens, cet article va être le plus grand teasing de l’histoire de la chronique : je veux AB-SO-LU-MENT vous donner envie de lire cet incroyable roman mais sans en divulgâcher l’intrigue (même s’il est vrai que l’essentiel n’est pas non plus dans ce « terrible » événement déclencheur)…

Pas facile mais je vais m’y tenir, promis (surtout n’allez rien lire ailleurs non plus, évidemment…)

Bon, on va faire court, moins de risque de laisser filer le moindre indice…

Imaginez un couple, Thierry et sa femme Élisabeth. Lui s’occupe de la maintenance des machines dans une usine, elle est infirmière. Leur fils unique, Marc, est parti vivre au Vietnam. C’est un peu dur pour eux, ce fils si éloigné… Ce matin, Thierry, le narrateur, s’est levé tôt. Il prend tranquillement son petit-déjeuner en admirant le paysage autour de sa maison qu’il aime tant. Il faut dire qu’il a quasiment tout fait avec ses mains… Chez les voisins tout le monde dort encore. Quand je parle de « voisins », le mot exact serait plutôt « amis ». Oui, Guy et Chantal, sont des amis, des vrais : ce sont des gens sur qui l’on peut compter : gentils, serviables, à l’écoute, toujours là pour dépanner… C’est rare les gens comme ça ! Et puis, si on y réfléchit bien, Guy est le seul ami de Thierry. Ils ont plusieurs passions communes : les insectes, les plantes, le bricolage, la bonne bouffe… Ils se donnent des coups de main, se prêtent les outils…. Il manque de la farine, des œufs ? On sonne à côté, c’est simple, et puis ça donne l’occasion de papoter un peu. Heureusement qu’ils sont là, les voisins, parce qu’il n’y a pas âme qui vive à moins de cinq kilomètres… D’ailleurs, ce matin, Thierry va devoir encore sonner chez Guy et Chantal, il a besoin d’une longue échelle, il y a certainement une fuite dans le toit…

Alors, pourquoi ce texte m’a-t-il tant plu ?

D’abord, il y a cet effet de surprise inouï qui nous saisit, nous laisse sans voix et complètement ahuri. Vous savez… Thierry qui doit aller chercher l’échelle chez les voisins… Hé, hé… Si vous saviez… Il faut vivre ce qui va se passer ensuite, ce choc, cette incompréhension face à cette « chose » innommable et que personne n’a vue venir… (Je vous tiens un peu, là, non? Pas encore, ah bon, continuons alors…)

Et puis, comme le titre ne nous laissait pas présager un tel événement, finalement, on ne sait plus ce qu’on lit et l’on poursuit pour le moins éberlué comme le sont les personnages de la fiction et sans trop savoir dans quelle direction l’autrice va nous mener maintenant que le pire est arrivé. Attention, je vous le dis tout de suite, la balance penchera du côté de l’intime, de l’introspection, bien loin du voyeurisme et du sensationnel…

Là, on le sent très vite : on est ferré, impossible de lâcher, la nuit (la vôtre) sera courte… Quant à la journée du lendemain, n’y pensons même pas !

(Ça y est, vous avez chaussé vos baskets pour courir chez votre libraire ? Soyez polis, je n’ai pas fini… Encore deux mots, hein!)

Il y a aussi tous ces petits détails dont fourmille le texte et qui font toute sa richesse : ils nous laissent entrevoir l’immense imagination de l’écrivaine, ainsi que son incroyable travail de documentation. L’effet de réel est saisissant. Où que l’on soit : dans une usine, accroupi dans l’herbe à observer les petites bêtes ou devant un paysage du Massif Central : on y est, on y croit, les scènes se déroulent devant nous… (Bon, d’accord, quand on s’appelle Tavernier, on a été à bonne école – je pense au père, bien sûr, mais aussi à la mère scénariste!) Impossible de faire un pas de côté : on vit ce que vit le personnage principal, Thierry, sa « tempête sous un crâne » : on est embarqué comme lui dans la tourmente. Que de finesse dans ce portrait d’un homme accablé, détruit, que de subtilités, de nuances dans la description de son évolution psychologique…

Encore deux mots… (si vous êtes encore là – j’en doute!)

Il a aussi cette écriture si juste, si sensible, si poétique…

Ces fins de chapitres remarquables…

Cette grande maîtrise de la construction…

Et enfin, cette fin si belle qui nous éclate à la figure, nous transfigure et nous emporte malgré nos réticences, nos résistances, nos refus… On touche là à l’humanité dans ce qu’elle a de plus absolu, de plus sublime…

Allez, je n’ai pas de mots, c’est magnifique et Tiffany Tavernier est la plus grande. »

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