RTL, « Laissez-vous tenter », Bernard Lehut, mardi 9 février 2021


Grand Prix RTL-Lire 2021 : Tiffany Tavernier finaliste avec son roman L’Ami
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Dans ce roman puissant, l’écrivaine imagine l’onde de choc ressentie par les voisins d’un couple de tueurs en série.

Tiffany Tavernier signe L’Ami, l’un des 5 romans finalistes du Grand Prix RTL-Lire 2021… « Ça m’a fait pleurer de joie, révèle l’autrice au micro de RTL. C’est une immense consolation pour moi. Ma mère est partie l’année dernière, c’est le dernier livre qu’on partagera ensemble. Que je fasse partie de cette sélection ça veut dire que maman n’était pas dans le faux [de considérer ce livre comme puissant] ». Un livre qui s’ouvre d’ailleurs par une scène d’une puissance visuelle singulière, digne d’un grand film d’action. Il est vrai que l’auteure, Tiffany Tavernier, elle-même scénariste, a de qui tenir puisqu’elle est la fille du cinéaste Bertrand Tavernier.

Un samedi matin, des hommes armés, accompagnés de véhicules de police et d’ambulances cernent la maison de Guy et Chantal, un couple apparemment sans histoire, en réalité un abominable tandem de tueurs en série de jeunes filles. Leur voisin et ami, Thierry, tombe des nues. Tiffany Tavernier s’est lancée dans l’écriture de son roman après avoir vu un reportage à la télé…

« Je vois ce type, en robe de chambre, hagard, c’est le voisin. Il vient juste d’être mis au courant de ce qu’il s’est passé à côté de chez lui et il répète en boucle cette phrase : Ça me hante, ça me hante, qu’est-ce qu’on va devenir…, se souvient l’écrivaine. Cette scène est restée dans un coin de ma tête. C’est comme ça que les romans surgissent ou pointent le bout de leur nez. Il y a aussi cette question du mal qui traverse le monde et celle de l’altérité ».

Culpabilité et altérité
Et toute l’originalité, le grand intérêt du roman de Tiffany Tavernier consiste justement, non pas à se focaliser sur les monstres et leur parcours meurtrier mais à raconter le séisme que déclenchent leur spectaculaire arrestation et la révélation de leurs crimes chez leurs voisins et amis, Thierry et son épouse. « Il y a d’abord cette question de la culpabilité, de n’avoir pas vu. Mais est-ce que c’était possible de voir ? Quand bien même un inspecteur vient vous dire que c’était impossible de voir, la culpabilité demeure. C’est un mal qui a traversé ma maison, qui a bu dans mes verres, qui s’est assis sur mon fauteuil…, égraine-t-elle. Et là, tout vole en éclats. Quand vous découvrez que vous avez participé sans le vouloir à cette chose-là, vous êtes seul au monde. »

Thierry, le solitaire, le taiseux, qui pensait avoir enfin trouvé un ami chez Guy, le monstre, se réfugie dans le déni avant de plonger dans une douloureuse mais salutaire remise en question personnelle. Très beau personnage, tout comme son épouse, Lisa, anéantie dans un premier temps mais qui se révélera la plus solide. « Cette femme qui est au départ un personnage plus discret, plus fragile, est la force du roman, assure Tiffany Tavernier. Car c’est aussi un roman d’amour. Il y a une inversion dans le roman, car celle que l’on pense être fragile… attention ! C’est aussi un livre sur les apparences. »