TÉLÉRAMA, Marine Landrot, mercredi 2 février 2014


« Les romans de Kéthévane Davrichewy ont toujours été construits sur des chiffres : un pour La Mer Noire, sur le crépuscule d’une exilée, deux pour Les Séparées, sur l’emprise en amitié, et quatre pour le livre qui paraît aujourd’hui, sur une fratrie adulte aux prises avec les souvenirs familiaux. Quatre, comme les pattes du bébé, comme les quatre copains qui ont attendu sa naissance, comme les quatre murs de la maison à vendre : chercher ce chiffre dans les pages est un jeu qui en vaut la chandelle. Non pas que Kéthévane Davrichewy compose ses histoires avec une précision mathématique – s’il fallait cerner sa position littéraire, ce serait à la convergence de la magie cabalistique et de la rêverie durassienne.

Les prises de paroles sont nombreuses, dans ce texte plié en quatre, comme un mouchoir cachant les problèmes enfouis au fond des poches. Un frère, une sœur, et deux jumeaux mixtes confessent leur trauma, sans que jamais les confidences ne sortent de la nuit. C’est tout l’art de Kéthévane Davrichewy de chuchoter au lieu de crier, de montrer que le non-dit est une parole. En demi-teinte, elle glisse de belles vérités sur le deuil, sur l’émancipation, sur la solitude qui en résulte. Et poursuit discrètement son œuvre sensible et stellaire. »