LE FIGARO LITTÉRAIRE, Sébastien Lapaque, jeudi 27 février 2020


« « Parle tout bas si c’est d’amour au bord des tombes », demande Paul-Jean Toulet dans un poème consacré aux Alyscamps, le cimetière arlésien peint par Vincent van Gogh. On songe à ce vers envoûtant en lisant Le Champ, le troisième roman traduit en français de l’écrivain autrichien Robert Seethaler. Mais il n’y a nul protagoniste dont la conversation bruyante pourrait réveiller les morts, dans Le Champ. Dans ce livre, ce sont les défunts qui parlent. Ou plutôt qui se souviennent, acteurs et témoins d’une étrange permanence de la conscience. On songe au psaume 18 — « Pas de parole dans ce récit, pas de voix qui s’entende ». Plutôt une longue et fascinante rumeur, qui passe de tombe en tombe, dont le jour au jour livre le récit, la nuit à la nuit donne la connaissance. »