LE MONDE DES LIVRES, Macha Séry, vendredi 8 février 2013


« Jamais trop tard »

« Un événement tragique, le suicide d’un homme sous ses yeux, conduit la narratrice à manquer son train, celui qui devait la conduire à l’Hôtel des Embruns où l’attend son amant. Sous le choc, elle marche dans la nuit, s’achète une robe verte, l’oublie sur un banc, pousse la porte d’un café, longe les quais de la Seine tandis que l’orage s’abat sur Paris. Le temps d’une veille jusqu’au matin, elle se souvient par bribes de dialogues de films, de lectures, de son enfance passée à la campagne auprès d’un grand-père aimé, de sa relation amoureuse avec le photographe qui, de Nantes, a rejoint l’hôtel pour la retrouver, peut-être une dernière fois. Car leur relation semble toucher à sa fin.

Dans ce long monologue où elle s’adresse à lui, elle lui rappelle des épisodes de leur vie commune puis intermittente : un concert à Carnegie Hall, une plage du Nord, quelques conversations, des malentendus, leurs voyages harmonieux, leurs retours discordants, la distance qui, entre eux, s’est peu à peu creusée. Les regrets se mêlent aux souvenirs du suicidé…

Écoute la pluie, le douzième livre de Michèle Lesbre, entonne le refrain des thèmes chers à la romancière : l’ombre portée de l’Histoire, l’empreinte indélébile laissée par les lieux et les cieux, les années qui dissolvent l’espérance, le fait aussi qu’il n’est jamais trop tard. Il y a là une magnifique justesse de ton qui tient à la retenue autant qu’à l’aveu. Une écriture simple et évidente, un précipité chimique dont les effets se prolongent, une fois le roman achevé. »